Avez-vous converti vos actions et identifié les ayants-droits économiques ?

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DE LA CONVERSION DES ACTIONS AU PORTEUR

Les sociétés dont le capital-actions n’est pas composé de titres cotés en bourse ou qui ne sont pas intermédiés, avaient un délai au 1er mai 2020 pour convertir leurs titres au porteur en titres nominatifs (article 622 al. 2ter nouveau).

Les sociétés qui ont des titres au porteur cotés ou intermédiés doivent faire inscrire au registre du commerce dans un délai de 18 mois, soit au 1er mai 2021 (article 2 des dispositions transitoires), que leur capital-actions est composé de tels titres.

Si la société n’a pas rempli ses obligations d’ici au 1er mai 2021, ses actions au porteur sont converties de jure, tant sur le plan de leurs effets patrimoniaux que sociaux, en actions nominatives (article 4 al. 1 des dispositions transitoires) et tant que les statuts n’ont pas été adaptés à cette conversion, l’inscription de la société au registre du commerce comporte alors une remarque de non conformité (article 4 al. 2 des dispositions transitoires) et les modifications de statuts restreintes (article 5 al. 1 et 2 des dispositions transitoires).

Les statuts doivent donc être adaptés en conséquence au plus tard lors de leur prochaine modification.

OBLIGATION D’ANNONCE DES AYANTS DROITS ECONOMIQUES ET CONSEQUENCES

Maintenant que le délai du 1er mai 2021 est passé et que les actions au porteur sont interdites, que faire?

Comme mentionné, vous risquez notamment de perdre vos droits aux dividendes et vos droits de vote. Il est donc primordial de procéder dès maintenant aux démarches nécessaires afin de vous confirmer à la loi en procédant à la conversion de vos actions au porteur en actions nominatives.

Si les titulaires d’actions au porteur converties en actions nominatives ne se sont pas conformés à l’obligation d’annonce de l’ayant droit économique au sens de l’article 697i CO de l’ancien droit, les droits sociaux de ces actionnaires seront suspendus et les droits patrimoniaux seront éteints.

Les actionnaires concernés disposent toutefois d’une dernière chance de se voir reconnaître leur qualité d’actionnaire s’ils introduisent, d’ici au 31 octobre 2024 au plus tard, une action dans ce sens, à leur frais, devant le tribunal du siège de la société.

Ils doivent démontrer l’accord préalable de la société à cette action et prouver leur qualité d’actionnaire (article 7 al. 1 et 2 des dispositions transitoires).

Si ce n’est déjà fait, il est absolument nécessaire de faire inscrire votre qualité d’actionnaire au registre des actionnaires de la société anonyme (SA). 3 étapes sont nécessaires à cet effet :

  • déposer une requête au tribunal compétent
  • obtenir l’accord de la société anonyme
  • apporter la preuve de votre qualité d’actionnaire

En cas d’approbation par le tribunal de cette demande, les actionnaires retrouvent leur qualité avec effet ex nunc, c’est-à-dire sans effet rétroactif (article 7 al. 3 des dispositions transitoires).

UNE INDEMNISATION POSSIBLE EN CAS DE PERTE DEFINITIVE DE LA QUALITE D’ACTIONNAIRE SANS FAUTE

A l’échéance du délai de 5 ans précité (i.e. au-delà du 31 octobre 2024), les actions au porteur converties en titre nominatif et dont le titulaire ne s’était pas conformé à l’obligation de l’article 697i de l’ancien droit, sont définitivement annulées et les actionnaires déchus de leurs droits. Ces actions sont transformées en actions propres de la société (article 8 al. 1 des dispositions transitoires).

Les actionnaires concernés qui peuvent démontrer que leurs actions « ont été annulées sans faute de leur part », peuvent toutefois en dernier recours faire valoir auprès de la société un droit à être indemnisés. Ce droit doit être opposé à la société dans un délai de 10 ans suivant la date de l’annulation des actions. Le requérant à cette indemnisation doit alors non seulement prouver qu’il n’a pas commis de faute, mais également qu’il était actionnaire au moment de l’annulation.

Le montant de l’indemnisation dû correspond à la valeur réelle de l’action au moment de sa conversion à moins que cette valeur soit inférieure au moment du dépôt de la revendication.

Attention, c’est l’actionnaire qui est le requérant (non son ayant-droit économique). Il convient de démontrer la valeur réelle des actions annulées, tant au moment de leur conversion qu’au moment de la date du dépôt de la requête en indemnisation auprès de la société.

Enfin, il est important de noter qu’une telle indemnisation est exclue :

  1. En cas de faute (et uniquement de faute, ce qui exclut la négligence)
  2. Si la société ne dispose pas de fonds propres librement disponibles permettant cette indemnisation.

Cette seconde exclusion représente une importante limitation. Il est uniquement possible de la prévenir à 100% en évitant de voir ses actions annulées, c’est-à-dire en respectant le délai au 31 octobre 2024.

LA RESPONSABILITE DU CONSEIL D’ADMINISTRATION

Le conseil d’administration est responsable du bon respect des dispositions légales précitées, mais surtout de mettre en place les conséquences liées au non respect de l’obligation d’annonce des ayants droits économiques, celles-ci devant être dûment consignées au registre des actions.

La révision législative impose ainsi d’importantes obligations au conseil d’administration de sociétés non cotées dont les actions sont au porteur. Il importe donc au conseil d’administration d’y prêter l’attention nécessaire et de s’entourer de conseils avisés en matière de droit des sociétés. Le risque d’engager leur responsabilité civile est significatif. Attention donc.

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Pour vous assister:  Me Stephane Rychen, Avocat